Il est difficile de ne pas constater que, dans le monde où nous vivons, les
phénomènes liés au stress et à ses conséquences sont de plus en plus manifestes. Pour autant, nombre d'officines font indûment de la difficultés de nos contemporains un fond de commerce qui n'est pas toujours très sain ni honnête. Il nous importe donc de prendre conscience de ce dont nous parlons, afin de ne pas mettre n'importe quoi sous cette dénomination de « stress », au cœur des risques psycho-sociaux. L'enjeu de cette prise de conscience est capital, car le stress que nous constatons constitue le symptôme, le témoin d'alerte d'un malaise plus profond qui, lui, n'est pas toujours visible, même si plusieurs enquêtes – dont le Baromètre Edenred Ipsos, Motivation et Bien-Etre des salariés Français Avril 2011 – attestent de son existence : « Démotivation, sentiment de trop s'impliquer, stress… Les salariés Français se disent moins souvent heureux au travail. » Ce malaise comporte un triple risque : Pour la santé des personnes Pour la performance du business Sur un plan juridique Mais avant de nous interroger sur les différentes causes, remèdes et précautions possibles, encore faut-il définir ce dont nous parlons, car le stress, dans sa nature, est simplement une réaction normale d'adaptation à des agressions, des tensions. L'agence européenne pour la sécurité et la santé au travail de Bilbao souligne qu'il provient d'une tension entre le regard que l'on porte sur les contraintes auxquelles on est confronté et les moyens dont on dispose pour y faire face. Il s'agit bien de la « perception » de la situation et pas nécessairement d'une réalité toujours objectivable. C'est pour cette raison qu'il n'est pas question, sur ce sujet, de se livrer à des jugements de valeur. Un peu d'histoire La notion de stress est utilisée aujourd'hui de façon assez large : le terme désigne, en fait, de troubles très divers dans leur origine et leurs manifestations. Anglicisme apparu en France vers les années 50, "stress" signifie en anglais "effort intense, tension" ; il n'est pas indifférent de savoir qu'il désigne initialement la contrainte exercée sur un matériau et qu'on parle de « stress » quand la contrainte est excessive ou que le matériau est "fatigué", qu'il y a par conséquent risque de déformation, voire de rupture… Dans son sens actuel, le stress désigne l'ensemble des réactions consécutives à une « agression ». Il dépend à la fois de l'agressivité de l'agent causal et des effets qu'il détermine. Le terme de stress peut, dans le langage courant, désigner à la fois l'agent responsable, la réaction à cet agent et l'état dans lequel se trouve celui qui réagit : il est précisément la réponse de l'homme aux facteurs d'agression organiques et psychologiques, ainsi qu'aux émotions (agréables ou désagréables) provoquées par la rupture d'un équilibre antérieur, et nécessitent de ce fait une « adaptation ». C'est en fait Selye, un médecin canadien, qui a conféré au stress la popularité qu'il a de nos jours. Il avait été frappé du fait que l'organisme réagissait de manière assez identique à des agressions de tous ordres, et il l'a observé surtout à propos d'agressions physiques : chocs des brûlés, choc hémorragique, choc opératoire, etc. Il a ainsi pu rassembler suffisamment d'observations de ce type pour pouvoir en faire une synthèse plus étendue, en lui donnant le nom de syndrome général d'adaptation, avec trois phases cliniques : Il est évident que toutes les agressions auxquelles peut être soumis l'homme n'entraînent pas toutes les réactions ci-dessus décrites dans leur caractère de gravité, et les capacités d'adaptation sont variables chez chacun. De la même manière, tous les stimuli qui « dérangent » l'homme ne sont pas nécessairement mauvais, et Selye a lui-même proposé les termes d'« eustress » et de « dystress », pour désigner le bon et le mauvais stress, le premier stimulant, le second désorganisateur et inhibant. Nous passons alors du stress physique au stress psychologique, pour autant que cette distinction ait un sens. Le stress correspond bien à une agression capable de faire ressentir à l'homme un état de danger, d'insécurité… par la rupture, la coupure qui se produit avec l'état antérieur. L'individu met en jeu diverses réactions pour la "neutraliser" si possible, en la faisant disparaître ou en s'y adaptant, pour retrouver un nouvel équilibre et une certaine constance, une certaine harmonie du milieu intérieur, une identité sécurisante de lui-même, qui puissent lui permettre de vivre sans difficultés majeures et pourquoi pas dans un certain « bien-être ». Un constat alarmant Néanmoins, la médecine du travail nous alerte depuis plusieurs années sur l'augmentation de doses de stress que les salariés ne parviennent plus à absorber, à « encaisser ». Les troubles musculo-squelettiques, les états de dépression, les réaction extrêmes sont en augmentation croissante : il n'est que de suivre l'actualité pour s'en convaincre ! Les enquêtes réalisées par l'ANACT sur le sujet ne sont pas moins éloquentes ! Et le ministère du travail, de l'emploi et de la santé a souligné que « les RPS se révèlent être un enjeu majeur en termes de santé publique ». Inévitablement, cela crée un risque de contre-performance significative pour les entreprises. Le coût de personnes présentes sur le lieu de travail, mais inefficaces à cause du stress, serait supérieur à celui de l'absentéisme (170€ par jour / par salarié contre 95 €)1. En tout les cas, il est certain que des situations de mal être chez les collaborateurs sont : au mieux des sources de dysfonctionnements, au pire très contre productives sur la bonne marche de l'entreprise... et de la société dans son ensemble : le coût social du stress en France se monterait« à 2 à 3 milliards d'euros »2. Les conséquences légales sont, dès lors, au rendez-vous : 107 décès par suicide ont fait l'objet d'une demande de reconnaissance au titre des accidents du travail au cours de la période janvier 2008-décembre 20093. Et un suicide au Technocentre de Renault en 2007 a été effectivement reconnu comme accident du travail par la Cour d'Appel de Versailles le 9 juin 2011. C'est dire que nous parlons d'un sujet qui engage évidemment la responsabilité de l'entreprise, même s'il peut y avoir des causes exogènes. Le ministère du travail l'a bien stipulé : « L'employeur est tenu d'agir sur "ce sur quoi il a prise" et donc sur les déterminants des risques psychosociaux dans son entreprise, sans violer l'intégrité psychique des intéressés ». Un sujet pertinent Bref, il y a 3 bonnes raisons de s'attaquer à ce sujet : Une raison morale : la santé des salariés Une raison concrète et opérationnelle : la performance des affaires Une raison juridique : la responsabilité des entreprises. Source : RH info www.rhinfo.com/
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Juin 2024
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